La lettre anonyme coûte un timbre à l’auteur et une vie à la victime. Le retour sur investissement est incomparable. Evidemment encore faut-il avoir une cible à disposition, ce peut être la femme adultère, l’entrepreneur, le maire, le voisin, enfin toute personne à qui l’on veut du mal pour se faire du bien. La lettre anonyme, fille aînée de la surveillance policière des régimes politiques totalitaires, est un bon moyen pour se débarrasser à moindres frais d’un(e) concurrent(e) gênant(e).
Pour ce faire, l’auteur doit réunir un certain nombre de « qualités », innées ou pas, et prétendre oser ce que la morale réprouve, notamment une bonne dose de lâcheté et de cynisme, ce qui n’est pas donné à tout le monde. Il faut aussi faire abstraction de l’histoire du 20ème siècle pour ne pas se voir comparer exagérément aux mises à mort assurées de juifs impuissants face à la politique génocidaire nazie.
Quand toutes les conditions requises sont réunies, il ne reste plus à l’auteur que d’observer, bien à l’abri, loin des regards réprobateurs, l’effet produit.
De sa confortable, mais pour beaucoup d’honnêtes gens, peu enviable position, celui-ci considèrera patiemment l’écho que sa missive lui renverra. Soit elle est mise au panier d’emblée par le réceptionnaire scrupuleux de la morale, soit des intérêts convergents s’agrègent et déclenchent une enquête et, faisant fi de la présomption d’innocence, sera adroitement médiatisée dans quelques cas méritants.
Ainsi va l’écume des jours, pour qui, s’ennuyant de tout et de rien, décide un beau matin de pimenter son ordinaire en devenant un corbeau « bien sous tous rapports ».
Une fois n’est pas coutume, quand l’actualité locale inspire l’ironie se nourrissant de la bassesse de la nature humaine.
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